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Fabriqué à Savenay par des personnes en situation de handicap, le biscuit bio, inclusif et handi-gaspi, réalisé à partir des invendus de pains, fait son entrée dans tous les trains de France. Une fierté partagée par les 3 co-fondatrices de la Biscuiterie Handi-gaspi et les personnes en situation de handicap qui fabriquent le biscuit en circuit court, de A à Z.
Saviez-vous que 600 millions de baguettes sont perdues chaque année, dont 200 millions directement mises à la poubelle dans les boulangeries ? Cela même alors que 1 Français sur 5 a des difficultés à se nourrir correctement et que le réchauffement climatique s’accélère, limitant les ressources en eau pour les céréales. Pour fabriquer une baguette de pain, entre la culture du blé, la transformation en farine et incorporation dans le pain, on utilise l’équivalent d’une baignoire remplie d’eau.
Un gaspillage alimentaire que ne supportaient plus Alix Guyot, Louise Douillet et Katia Tardy (en photo), 3 ingénieures agro-alimentaires qui se sont rencontrées dans une association nantaise pour l’insertion des personnes en situation de handicap. Elles ont alors l’idée de se servir de ces invendus de pains bio pour créer le biscuit « Kignon », un délicieux petit biscuit fabriqué à partir d’invendus de pains bio et d’ingrédients locaux et équitables, récupérés dans plusieurs boulangeries bio de la région nantaise et du littoral.
Ces pains sont transformés en farine recyclée, qui est ensuite intégrée dans chacune des recettes. Une valorisation du pain qui représente une importante économie d’eau. « Dans notre atelier de Loire-Atlantique, nous valorisons 30 tonnes de pains invendus bio par an, l’équivalent de 120 000 baguettes. Cela représente 25 millions de litres d’eau, donc environ 10 piscines olympiques chaque année », souligne Katia Tardy, co-fondatrice de Kignon, en charge de la communication.
Mais l’ambition des trois « Drôles de dames de la biscuiterie » ne s’arrête pas là. Portées par leur envie de « donner du sens à leur projet, de créer une entreprise à impact sociétal et environnemental qui vienne agir concrètement contre le gaspillage et pour l’inclusion des personnes en situation de handicap », elles partent à la recherche d’un personnel en insertion. Il se trouve que « les ESAT (Etablissements et Services d’Aide par le Travail) sont régulièrement en recherche d’activité pour leurs usagers. Cette situation de sous-activité s’est aggravée depuis le COVID : les ESAT sont en permanence en recherche de nouveaux projets pérennes pour former les travailleurs à d’autres compétences métier », explique Katia Tardy. Après quelques semaines de recherches, l’ESAT de Savenay leur répond positivement, suite à l’arrêt d’une précédente activité de reconditionnement suspendue avec le Covid justement.
L’aventure de la « Biscuiterie Handi-Gaspi » est alors lancée début 2022 ! « L’ESAT de Savenay avait des locaux disponibles, du personnel pour former les équipes et adhérait complètement au projet », raconte Katia. Aujourd’hui, trente personnes fabriquent les biscuits Kignon, de la fabrication de la pâte, au reconditionnement et à la distribution. « Tout est fait sur place à Savenay avec les équipes en situation de handicap, ajoute Katia. Un beau partenariat s’est créé avec les équipes médico-sociales sur place. On a dû repenser toute l’activité et adapté tout le process pour prendre en compte les handicaps mentaux et psychiques pour choisir les bonnes machines et rendre visuelles toutes les étapes pour ceux qui ne savent pas lire et écrire, de manière à ce que chacun puisse s’épanouir dans ce nouveau métier ».
Le trio d’entrepreneures a pu, dès le début, compter sur des partenaires locaux, pour les accompagner dans leur développement. Les boîtes sont imprimées au local, à Vigneux de Bretagne (44). Le biscuit Kignon est présent dans 600 magasins bio et depuis le mois de juin… dans tous les trains de France. L’hôtellerie-restauration en est aussi très friande puisque les biscuits sont notamment proposés dans les hôtels Barrière à la Baule.
La sensibilisation à la lutte contre le gaspillage et l’inclusion sont aussi leur credo. « A Savenay, nous organisons des ateliers de sensibilisation à l’handi-gaspi, de la maternelle au lycée, où nous allons sur la pause déjeuner avec nos travailleurs en situation de handicap, pour fabriquer des gaufres en direct à partir des invendus de pain ». Nous proposons aussi ces ateliers dans les entreprises, ou accueillons directement dans nos locaux pour découvrir notre activité. « Cela nous booste au quotidien de voir que ces personnes en situation de handicap sont épanouies dans ce qu’elles font. Des familles nous appellent pour nous dire que les personnes ont retrouvé une fierté à travers cette activité. Alors qu’ils ne parlaient pas de leur travail avant, ils ont acquis une visibilité à travers les nombreux médias qui sont venus nous voir. On essaie de les rendre visibles autant que l’on peut, en les emmenant sur la remise de prix et dans les démonstrations ».
La matière première est récupérée au plus près. « Nous travaillons avec des boulangers partenaires, les sociétaires Biocoop du bord de mer ou de Nantes et Biofournil ». Côté business, les entrepreneures sont bien entourées : elles adhèrent à plusieurs réseaux comme Entrepreneurs Bio des Pays de la Loire, Saveurs Détonnantes, GIRPEH pour l’emploi et le handicap, et le Réseau Entreprendre, « l’un des plus structurants, sous le coaching de Pierre Chartier, directeur des centres Leclerc de Paridis et Atlantis » qui pourrait leur permettre de distribuer dans ses magasins à terme. Les demandes affluent de partout en France. La moisson de concours qu’elles ont remportés leur a permis de financer en partie leur développement.
Ce modèle à impact positif va bientôt être dupliqué dans d’autres régions de France, à Paris et Lyon au cours des prochains mois, avec à chaque fois, l’engagement de mettre en place une démarche 100% bio, locale et handi-gaspi. « L’ambition est vraiment de porter le label handi-gaspi à l’échelle nationale chez d’autres acteurs. Et pourquoi pas demain transformer des fruits moches en confiture ou des meubles avec des chutes de bois », imagine déjà Katia Tardy.
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