">
Mickaël Keromnes a fondé l’entreprise Cedreo à Nantes en 2013. Portée par une forte croissance, l’entreprise qui développe et commercialise des logiciels d’architecture 3D pour la construction de maisons a obtenu le label Bcorp en 2020, sceau de son cheminement vers une démarche respectueuse de son environnement.
« La performance d’une entreprise ne doit pas être seulement économique, elle doit être systémique et prendre en compte toutes les parties prenantes de l’entreprise et son impact environnemental. La vision de l’entreprise qui a pour seul but de générer de la richesse financière remonte à l’école de Chicago et Milton Friedman il y a plus de 40 ans. Elle me parait un peu obsolète en 2021 ! ». Cette conviction forte, le dirigeant de Cedreo Mickael Keromnes l’a acquise au Centre des Jeunes dirigeants (CJD) à Nantes où il a fait ses premiers pas en tant que chef d’entreprise.
Cedreo commercialise des logiciels pour la construction de maisons en BtoB. Depuis 2017, l’entreprise connaît une accélération de sa croissance, recrute fortement et s’implante à l’étranger, en Allemagne et aux Etats-Unis. Mais pour son directeur, une question se pose : Comment s’assurer que la croissance de l’entreprise soit à la fois soutenue et soutenable ? Quel impact l’entreprise Cedreo veut-elle avoir sur son environnement et sur son territoire ? « Quand on voit le réchauffement climatique, notamment, il est clair que l’entreprise a son rôle à jouer. L’environnement est à prendre au sens « écosystème de l’entreprise ». L’entreprise doit prendre soin de son environnement, mais aussi de son équipe et des clients ».
Pour structurer sa réflexion, son fondateur envisage alors le cheminement vers la labellisation BCorp. « Ce label américain est le seul label vraiment reconnu à l’international pour valoriser la démarche RSE d’une entreprise », souligne Mickael Keromnes qui décide de faire de cette labellisation BCorp un objectif stratégique. « Si ce n’est pas un objectif stratégique, on ne met pas les mêmes moyens pour réussir. Comme pour le reste, il faut que un bon niveau de structuration et de délégation, sinon les choses n’avancent pas ».
La
labellisation Bcorp aide Cedreo à structurer sa démarche et à fixer des
objectifs sur chacun des 5 piliers (environnement, sociétal, social,
gouvernance et clients). « Le but est de s’améliorer en permanence,
d’aller aussi chercher des choses qui ne sont pas dans BCorp, qui est
très américain avec des objectifs qui ne sont pas forcément toujours
adaptés à notre culture comme la discrimination positive etc. Nous avons
créé un comité d’impact avec un salarié leader par pilier et un budget
de 1% du chiffre d’affaires ». Tous les salariés de Cedreo disposent de 6 jours par an pour se consacrer à des actions en lien avec la RSE. « Un
responsable RSE dédié ne pourrait, de notre point de vue, pas avoir
autant d’influence pour faire bouger les lignes que l’ensemble de
l’équipe ». Cedreo a mis en place une méthode pour faire remonter
toutes les idées par capillarité, notamment pour construire la stratégie
de l’entreprise à 3 ans. Les deux tiers de l’entreprise participent au
process sur la base du volontariat.
Et
les résultats sont au-delà des attentes ! « Notre logo est un arbre. Et
de même qu’un arbre ne peut vivre sans écosystème, nous ne pouvons pas
vivre hors-sol ». Installée dans le quartier de Bellevue, l’entreprise
tente d’apporter sa pierre en faveur d’une meilleure intégration des
habitants dans la vie économique. De nombreux stages de découverte sont
proposés pour les collégiens de 3e, des actions sont menées avec la
Maison de l’emploi pour amener les femmes vers les métiers du numérique,
etc. « Nous essayons vraiment d’être pro-actifs, de donner des idées, c’est le volet « Communauté » de la labellisation BCorp ».
En interne, une association de salariés est créée. Très active, elle
crée une cohésion de groupe, organise des soirées, des événements etc.
Sur le plan environnemental, l’équipe de Cedreo n'hésite pas à mettre haut la barre des engagements. « Nous
voulons réduire de 40% nos émissions carbone d’ici 2025, et non 2030
qui est l’horizon des politiques européennes sur le sujet. Contrairement
aux industriels, qui ont souvent de grosses immobilisations, nous
sommes dans un métier où nous pouvons agir vite. En allant nous
développer aux Etats-Unis, notre bilan carbone en prend un coup. Il
faudra s’y rendre en avion et leur électricité est plus carbonée que
chez nous ». Tous les pans de l’entreprise sont passés au crible
pour réduire autant que possible les émissions carbone. Dans le
tertiaire, l’essentiel de l’impact est lié aux déplacements
domicile-travail et chez les clients. Le télétravail avait été mis en
place chez Cedreo bien avant le confinement. « Les 40 collaborateurs ne se
déplacent au bureau qu’un à deux jours par semaine, nous proposons plus
de formations à distance pour nos clients et l’avion est proscrit pour
les déplacements à l’échelle nationale. Notre directeur commercial
travaille depuis Montpellier et fait les trajets vers Nantes en train.
Cela prend plus de temps, mais il en profite pour travailler ». Ce
qui ne peut être réduit est compensé. Cedreo a fait appel aux Nantais de MiniBigForest qui développent des forêts urbaines et à Envol Vert, qui
préserve des forêts en Amérique du sud avec une approche holistique
(agriculture locale et biodiversité), « la France ayant déjà beaucoup de
surfaces boisées ».
C’est
pour inciter d’autres entreprises du territoire de Nantes & Saint-Nazaire
à rejoindre la dynamique que Mickaël Keromnes vient de lancer en mars
le réseau « entreprises positives.org ».
Comment mesurer les différences de salaires hommes-femmes ? Comment
réduire sa production de déchets ? Comment mettre en place un mécénat ? «
Devant l’ampleur de la tâche, les entreprises ne savent souvent pas
par où commencer. Aujourd’hui la connaissance sur ce sujet est encore
dans la tête des consultants. Par notre culture de l'open source en
informatique, ce collectif invite toutes les entreprises à partager des
actions concrètes, simples à mettre en œuvre, pratiques et documentées,
et apporter des réponses en fonction du niveau de maturité de
l’entreprise sur la RSE pour le bien de tous ». Une vingtaine
d’entreprises de tous les coins de France partagent déjà leurs bonnes
idées sur cette plateforme. Car le parcours vers la labellisation Bcorp
est lourd et semé d’embûches. « Nous avons fait des erreurs. La
première était de monter un comité d’impact et de lui donner carte
blanche, sans fixer d’objectif. Cela n’a pas fonctionné. Comme pour le
reste du business, le Codir a repris la réflexion pendant toute une
année, pour aboutir à une nouvelle feuille de route avec des objectifs
et les grandes lignes stratégiques que l’on a transmis à nouveau au
comité d’impact ».
Au final, l’entreprise a tout à y gagner.
Avec l’entreprise positive ou l’entreprise à impact, c’est un cercle
vertueux qui se met en place pour le bien de tous : de l’écosystème, de
l’entreprise et des collaborateurs. « L’entreprise positive apporte
énormément de sens à tout le monde, et à moi le premier, affirme Mickaël
Keromnes. Les générations qui arrivent sur le marché de l’emploi y sont
sensibles, comme les générations plus âgées. En ce moment, alors que
nous lançons des recrutements, cela fait partie des éléments
d’attractivité en termes de marque employeur. Les cabinets de
recrutement nous confirment que c’est un vrai atout à l’heure où il y a
une grosse guerre de talents sur le numérique ». Encore faut-il
faire attention à ne pas tomber dans le green-washing. Une vigilance à
laquelle Cedreo veille particulièrement en communiquant régulièrement
sur ses résultats concrets et les erreurs commises. Et les résultats
sont là. « Nos clients nous disent qu’ils aiment travailler avec
nous, que nos collaborateurs ont la banane ! On vend bien plus qu’un
logiciel ! ».
Découvrir Cedreo