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"Le meilleur déchet est celui qu'on ne produit pas" - Bertrand Eloud - Ruffault Traiteur

"Le meilleur déchet est celui qu'on ne produit pas" - Bertrand Eloud - Ruffault Traiteur

Bertrand Eloud est le directeur de Ruffault Traiteur depuis 2015. Gaspillage alimentaire, valorisation des déchets, inclusion,... ce professionnel témoigne des transitions environnementales et sociétales qui font évoluer plus vite que d'autres le secteur de l'événementiel.


Avec son équipe de 80 personnes installée à proximité du MIN de Nantes, cet entrepreneur privilégie l'approvisionnement en circuits courts et fait de la lutte contre le gaspillage alimentaire et la valorisation des déchets en tout genre, l'un de ses chevaux de bataille. Rencontre avec un acteur engagé, qui joue la carte du collectif et de l'inclusion. 


Pouvez-vous expliquer l'activité de Ruffault Traiteur ?

Nous sommes traiteurs-organisateurs de réception, et basés à Nantes, avec un second laboratoire à Rennes. Ruffault Traiteur Nantes, ce sont aujourd'hui 35 salariés permanents en CDI, et 80 personnes équivalent temps plein. Nous appartenons au groupe familial Convivio, spécialisé dans la restauration collective et qui souhaitait diversifier ses activités sur le territoire.  Nous nous adressons essentiellement à une clientèle professionnelle (congrès, salon professionnel, soirées d'entreprise).


 

Comment avez-vous vu évoluer votre activité de traiteur au cours des dernières années ?

L'événementiel a changé en soi : avant, nous étions dans la surenchère sur chaque événement, dans l'opulence, il fallait toujours faire mieux… mieux que la fois précédente, mieux que son confrère, mieux que la ville d'à côté. Aujourd'hui, on constate un retour à la raison, pour des événements plus responsables, plus raisonnables. C’est justement ce sur quoi nous nous engageons à travers notre démarche ISO 20021 pour un événement plus responsable, avec des marqueurs forts en termes de circuit court, de lutte contre le gaspillage alimentaire, de valorisation de nos déchets, sur toutes ces actions très pratiques finalement. Autre sujet auquel nous allons nous attaquer, c’est notre bilan carbone. Nous manquons encore d’outils pour pouvoir avoir la bonne mesure de l'impact de notre activité sur l'environnement, mais c'est quelque chose qui nous touche. 


La valorisation des déchets est aussi un sujet qui vous tient à cœur …

En effet, j’ai coutume de dire que le meilleur des déchets celui qu'on ne produit pas. Le premier axe consiste donc à diminuer notre quantité de déchets. Aujourd'hui sur le site de Nantes, nous avons mis en place un tri des déchets sur sept flux de valorisation : valorisation des biodéchets avec la coopérative Terra Compost qui les transforme en terreau pour nos maraîchers, mais aussi valorisation du verre, des cartons, du polystyrène, du plastique, des palettes, des cagettes, etc. où l’on a la chance de pouvoir s'appuyer sur le centre de tri du MIN de Nantes. Et pour la vaisselle, c’est fini l’époque où l’on voyait du plastique partout sur les prestations, avec des verrines, des mini-cuillères, des mini-contenants. Nous l’avons remplacée par de la vaisselle en porcelaine qui va être lavée et réutilisée, ou alors sur des produits biosourcés, majoritairement à base de bambou, ou de la pulpe de canne, des produits biosourcés. Le bambou a sept cycles en une année, la pulpe de canne, c'est de la récupération de la canne qui a été travaillée avant d'être destinée à de l'alimentaire. Nous essayons d’avoir le moins d’impact possible sur l’environnement.

 

Quelles sont vos actions en faveur de l’inclusion ?

L’inclusion, c'est le sujet du moment chez Ruffault Traiteur. Nous avons la chance, en étant adossé au groupe familial Convivio, d'avoir une ambassadrice du handicap et de la diversité, en la personne de Nantenin Keïta, qui participait aux derniers Jeux Paralympiques de Paris. On forme nos équipes pour les volontaires à être handi-acteurs, c'est-à-dire être vraiment en capacité de pouvoir accueillir dans la meilleure manière des membres de personnel avec une différence ou un handicap. Nous nous inscrivons également dans une démarche DuoDay, au niveau du groupe : nous allons accueillir pendant une journée, selon les métiers, une personne avec un handicap pour faire découvrir notre métier, dans le but de pouvoir attirer aussi ces personnes-là dans notre métier. Une autre action est que nous travaillons avec des ESAT, tant pour l'entretien de nos espaces verts que pour certaines prestations (pâtisseries, biscuits secs, etc.) que l’on intègre à notre offre culinaire, en valorisant effectivement leur savoir-faire et effectivement qui a produit ces denrées.




Quels sont les atouts du territoire pour votre activité ?

A Nantes Saint-Nazaire, nous avons la chance de bénéficier de sites remarquables, que ce soit la Cité des congrès de Nantes, le parc des expositions de la Beaujoire, Exponantes, unique en France avec un environnement complètement incroyable, avec la proximité du fleuve de l’Erdre, mais aussi le Zénith et encore tout un ensemble d’infrastructures autour de Nantes. Notre terrain de jeu est attractif et varié et permet de rassembler un grand nombre de convives pour des événements de grande envergure. Nous avons aussi la chance d’être situé dans une région dynamique sur le plan économique avec beaucoup de pôles de performance, que ce soit avec le CHU, l'Université de Nantes, IFREMER, où ont lieu des congrès scientifiques ou sur la recherche, sans compter le dynamisme de l’industrie avec des fleurons, comme Airbus ou les Chantiers de l’Atlantique.

 

En quoi cet environnement vous permet-il d’être plus vertueux ?

Nous avons la chance d'avoir à proximité une activité maraîchère très importante. Nous sommes aussi à proximité de la mer, dans une région viticole, et donc beaucoup de producteurs locaux avec lesquels travailler, ce qui est un atout considérable par rapport à d'autres régions. La proximité de nos locaux avec le MIN de Nantes, 2e marché d'intérêt national nous permet de travailler une multitude de produits. En réalité, ce sont 80% de nos fournisseurs qui se trouvent à proximité à 5 minutes de notre laboratoire. C’est aussi un confort pour nos équipes et c’est en ligne avec notre volonté de travailler en circuit court et local.




De quoi êtes-vous le plus fier ?

Avant tout de mon équipe, de notre équipe ! Nous pratiquons un métier exigeant, et avant tout, il faut surtout remercier les équipes qui sont sur le terrain, au quotidien, en labo, le soir, tard, le week-end, et c'est ce qui fait aujourd'hui qu'on est aussi fiers de ce qu'on fait.

Ensuite, la particularité de Nantes, c'est cette capacité à travailler ensemble. C’est une dynamique qui s'élargit à l'ensemble de toutes les filières de l'événementiel avec le travail du Bureau des congrès. Quand Nantes accueille un grand événement, on sait travailler ensemble, plutôt que les uns contre les autres, se fédérer, mutualiser, et faire en sorte qu’un événement de grande ampleur soit une réussite !

Vous soulignez le rôle du Bureau des Congrès. En quoi vous accompagne-t-il dans vos démarches de transitions environnementales et sociétales ?

C'est un vrai moteur ! Individuellement, ce n'est pas évident d'avancer. Et aujourd’hui, grâce au Bureau des congrès, il y a une parole, un message, qui est porté par l'ensemble de la destination et l'ensemble de la filière événementielle, tout corps de métier confondu.

Nous menons notamment ensemble cette démarche sur le gaspillage alimentaire, avec la charte et les bonnes pratiques qui en découlent. Nous allons essayer de prêcher la bonne parole auprès de tous nos nouveaux organisateurs d'événements à Nantes. Nous bénéficions, avec la dynamique du bureau des congrès, d'une expertise avec des vrais professionnels et des gens qui sont entièrement dédiés à la RSE. Dans ce type de démarches, comme sur l’empreinte carbone, nous avons besoin d'être accompagnés. C'est vrai pour nous, c'est vrai pour de plus petites structures. Et tous ensemble, nous portons à Nantes ce discours commun, que l’on aille voir Ruffault Traiteurs ou un autre confrère.

 



Quel a été le plus gros challenge que vous ayez eu à relever ?

Le plus gros challenge a été la reprise post-Covid. Quand on s’est retrouvés avec un effet report des événements, où tout s'est reporté sur 2022 et qu'on nous a donné l'autorisation de nouveau de travailler. On s'est retrouvés au 1er septembre, avec un plan de charge énorme, sauf que le problème était qu'il n'y avait plus de personnel, beaucoup de gens avaient quitté la profession ! Nous avons eu de grands moments de solitude, et pour être très honnête, de septembre à fin décembre 2022, cela a été très dur.  Mais, cela a été en même temps très enrichissant, parce qu'il a fallu serrer les coudes, avec notre noyau d'équipe qui était resté, et puis les nouvelles personnes, qu'on a réussi à emmener avec nous à ce moment-là.

 

Et côté activité événementielle ?

En 2023, avec le congrès des APM, où nous devions servir 6 000 personnes à trois reprises. Ou encore le congrès Atout France également en 2022, qui était justement après le Covid, ce qui faisait du bien, parce que ça faisait tellement longtemps, qu'on n'avait pas vu un événement de cette ampleur, avec beaucoup de publics internationaux. On voyait vraiment le plaisir, nous, nos équipes, la fierté d'assurer une belle prestation, et puis surtout le plaisir des convives, de participer à des événements comme celui-ci à grande échelle. Sans compter que nous avions pu faire une très belle soirée, aux Machines de l'île, avec un grand marché géant, c'était vraiment chouette. Cela fait justement partie des événements que nous avions réalisé à 4, avec 3 de nos confrères, donc il y avait une belle mutualisation des savoir-faire, un super état d'esprit, ce sont les deux plus beaux événements, les deux les plus représentatifs, en tout cas pour moi en termes de fierté !

 



C’est quoi pour vous être entrepreneur aujourd’hui ?

Être entrepreneur aujourd'hui, c'est être à l'écoute de ses équipes, je pense c'est savoir s'entourer.  Donc seul on ne fait pas grand-chose. Donc c'est avoir effectivement une bonne équipe, prendre soin de son équipe, être à l'écoute de son équipe, innover, avancer, créer, fédérer.

Un message pour un entrepreneur demain ?

C'est effectivement être entouré. Et savoir apprécier les réussites, savoir dire quand on a réussi, savoir quand on est satisfait, le dire, le communiquer. Être humble je pense, et puis apprendre de ses erreurs, parce que l’on en fait forcément. Et c'est aujourd'hui aussi de réussir à faire venir de nouvelles vocations, de nouveaux talents, accueillir des apprentis, faire aimer le métier. C'est un métier qui est plus exigeant que d'autres en termes de disponibilité d'investissement. Et puis qui est aussi un métier physique, on va travailler 7-7 le soir éventuellement, quand nos amis et la famille se reposent. Travailler dans un laboratoire, dans des conditions qui sont aussi sous atmosphère, dans des pièces à 8-10 degrés. Il faut être conscient de ces contraintes métiers, et compenser en tout cas avec certainement une approche humaine encore plus importante que dans toute autre activité.


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